Le reportage photo ne laisse pas grande place au hasard… sinon celui de circonstance qui consiste à s’adapter aux imprévus de la situation rencontrée pour en tirer le meilleur parti. C’est d’ailleurs tout l’art du reporter que d’être une forme de caméléon agile, épousant les formes du terrain, jouant avec la lumière et les lignes, cadrant et décadrant, alternant premier et second plan… pour faire ses images.
Que l’on soit pro ou amateur, au sens de non-professionnel, réussir un reportage photo demande le respect de quelques prérequis pour se mettre dans les meilleures conditions possibles afin de permettre ensuite au talent de chacun de s’exprimer. Check-list en trois étapes…
Préparer son matériel et anticiper la configuration des lieux si possible
Il n’est pas utile d’être dans la surenchère de matériel : un bon boîtier suffit dans le sac, dans l’idéal un reflex 24×36 en capteur plein format. Deux ou trois optiques pas plus :
- Un grand angle : 24/70 mm ou focale fixe 24 mm, 28 mm… de préférence à un 16/35 mm, par exemple, au champ de couverture plus large mais qui déforme sur les bords au 16 mm
- Un zoom : 70/200 mm c’est l’idéal pour les portraits, gros plans…
- Un 2e zoom optionnel : 100/400 mm idéal pour la photo de sport… plutôt en diurne car l’ouverture à f4.5/5.6 en limite l’utilisation en nocturne sinon à pousser la sensibilité ISO du boîtier pour compenser, avec le risque de générer trop de bruit numérique sur les fichiers (en argentique, on parlait de grain photo)
A titre indicatif, voici le contenu d’une valise de l’agence Ouest Médias pour un match de football, Ligue 1, Europa League…
- Boîtiers (x3) : Canon EOS 1DX2, 1DX et 7D Mark 2 ; le 3e boîtier est placé derrière le but et télécommandé
- Optiques (x4) : 16/35 mm pour le boîtier télécommandé, 24/70 mm, 70/200 mm et 400 mm f2.8
- Flash (x1)
- Cartes : Compact Flash (x4) et SD (x6) avec deux lecteurs
- Macbook Pro : pour traiter et diffuser en temps réel
Lire sur le même sujet : comment réussir vos photos de football ?
Pour un reportage économique, actualité… pour la Région Pays de la Loire, le sac est allégé…
- Boîtiers (x2) : Canon EOS 1DX2 + 1DX en secours
- Optiques (x3) : 16/35 mm et 70/200 mm f2.8 + 24/105 mm f4
- Flash (x1)
- Macbook Pro
Les batteries doivent être remises en charge en rentrant au bureau, après chaque reportage… pour être à 100% et prêtes à repartir. Surtout si le même matériel est utilisé par plusieurs photographes, pensez aux copains… De même, pour les piles rechargeables de flash, avec un 2e jeu dans le sac. Tout souci sur un boîtier, une optique… doit être signalé sans tarder pour envoi en réparation car les SAV des marques ne sont pas toujours d’une grande célérité. Un pinceau anti-poussières et un chiffon sont les bienvenus.
La préparation des prises des vues est un élément essentiel. Si des repérages sont possibles, il ne faut pas hésiter pour anticiper les contraintes des lieux, déterminer la position du soleil et des ombres relatives, etc… Si le repérage n’est pas possible, Google Maps peut d’avérer d’un bon secours en solution alternative.
Selon le brief du client, des recherches complémentaires pour creuser le sujet sont souvent un bon investissement s’il s’agit d’engager un peu de conversation pour mettre un sujet en confiance avant une séance de portrait ou, tout simplement, déterminer les points différenciants ou spots de l’endroit où l’on se rend.
Enfin, munissez-vous des coordonnées du ou des contact(s) sur place. Avec les notes issues des recherches ci-dessus, stockez tout cela dans un fichier mémo sur votre smartphone ou de façon manuscrite dans un petit carnet de poche.
Sur le terrain, assurer l’essentiel avant de vous lâcher !
Quelque soit le sujet, un reportage commence par un échange, une discussion… parler et nouer une relation de confiance, c’est déjà une fraction réussie de la photo, la capacité de la personne en face à vous donner une part d’elle-même dans l’image en échange de l’intérêt que vous lui aurez consacrée en amont. Rien de pire que d’arriver en territoire conquis !
Ce préalable posé, le plus prudent est d’abord d’assurer l’essentiel avant de laisser libre court à votre créativité. Cadrer simple et utile pour rentrer les prises de vues de base, en phase avec la demande. Puis, vous pouvez vous lâcher selon votre vision personnelle des choses, votre culture… et votre humeur du jour.
Trouver la juste mesure dans la dose car il faut penser à l’editing et traitement ultérieurs… qui se font à la main (pas d’intelligence artificielle dans ce process !) et sont chronophages dont source de perte de rentabilité. Surtout si vous avez travaillé en RAW (une bonne précaution quand les conditions de lumière sont complexes), le format brut, qui demande un développement à l’unité via un logiciel dédié comme Adobe Lighroom.
Sur cette question de la qualité, un conseil : ne compressez pas au niveau du boîtier (réglage en jpeg 10 voire 12 avec des paramètres de couleurs, contraste et luminosité au neutre) pour avoir des fichiers qui soient les meilleurs en sortie de carte mémoire. Mieux vaut alléger en post-production et cela laisse aussi une marge de manœuvre pour d’éventuels recadrages… qui sont toujours à considérer avec précaution. Une image réussie demande le minimum de traitement ! N’en déplaise aux adeptes d’Instagram…
Si vous devez transmettre en direct ou alimenter en temps réel des réseaux sociaux, comme lors d’un Livetweet… même principe : production HD et mise en place de scripts Photoshop pour envoi des photos au bon format selon le canal de diffusion socialmedia :
- Twitter c’est plutôt en 16/9e
- Alors qu’une story Instagram inverse le rapport en 9/16e…
Il faut s’adapter pour simplifier en bout de chaîne le travail du community manager.
Editing, traitement numérique, indexation IPTC, transmission et archivage
Une fois rentré, le sentiment du devoir accompli… un autre travail commence. Les cartes ayant été vidées dans l’ordinateur de bureau ou portable, PC… ou Mac par inclinaison personnelle, une première sauvegarde de la production brute sur un disque dur externe est à effectuer sans attendre. Car rien de pire qu’une fausse manœuvre et la perte du reportage !
Vient alors la phase d’editing ou tri. Un logiciel comme Photo Mechanic 6 sera un allié utile (voir vidéo ci-dessous). Il fonctionne selon le principe des anciennes tables lumineuses sur lesquelles les planches de diapositives ou de négatifs étaient posées… Il est pourvu de fonctionnalités, simples à complexes, pour automatiser. Il permet de copier les fichiers originaux, depuis un dossier source vers un dossier de traitement pour travailler sur les copies sous Adobe Photoshop avec lequel il est interfaçable.
Au regard des dizaines de milliers de photos circulant chaque année au sein de l’agence Ouest Médias, le parti pris adopté est de réduire le traitement à l’essentiel pour éviter d’engorger le workflow et garantir une livraison au client dans les meilleurs délais.
En conséquence, il n’y a pas ou très peu de recadrage. Lumière et contraste sont les deux seuls variables à être éventuellement corrigées.
Le plus important, avant l’envoi puis la mise en base, est le renseignement des champs IPTC, cette sous-couche d’informations textuelles dans l’image. C’est aussi l’avantage de choisir Photo Mechanic (aucune affiliation commerciale dans cet article, l’agence paie ses licences pour ce soft) qui remplit cette mission avec la capacité à créer des templates ou modèles. Chaque photo est ainsi pourvue de sa légende interne. Les champs IPTC complétés garantissent des archives utiles en base de données car, selon la requête ultérieure formulée, on trouvera tout de suite les photos correspondantes, un mois ou un an plus tard.
Pierre Minier / Ouest Médias